L’inconscient ne se manifeste pas seulement dans les rêves. On le retrouve aussi dans les petits "accidents" de la vie quotidienne : lapsus, oublis, mots d’esprit, erreurs ou actes manqués. Ces moments, en apparence anodins, disent souvent bien plus que ce que l’on croit.
Le lapsus
Une patiente voulait dire : « Il m’a beaucoup soutenue ».
Elle a dit : « Il m’a beaucoup soumise ».
Un mot de travers… qui traduit en fait son ressenti vis-à-vis de son mari.
Le mot d’esprit
Un patient, épuisé par son chef, lâche en riant :
« De toute façon, mon chef, c’est un vrai che-fou. »
Le jeu de mots amuse, mais révèle aussi la folie ressentie dans cette relation.
L’oubli
Un jeune homme raconte un souvenir d’adolescence, mais oublie le prénom d’un ami présent ce jour-là.
Cet ami était aussi celui qui l’avait humilié… Un oubli qui n’a rien de neutre.
L’erreur de date
Une patiente vient un mardi, alors que sa séance était le mercredi.
En parlant, elle réalise que ce mardi est aussi l’anniversaire de sa mère.
L’erreur devient un message inconscient.
L’acte manqué
Une patiente, contrôleuse de gestion, raconte qu’après la démission de sa chef, elle se retrouve seule pour gérer le service et former une prestataire censée l’épauler. Mais cette dernière, incompétente, lui pose sans cesse les mêmes questions et ralentit son travail. Dans ce climat de surcharge et d’épuisement (elle a déjà connu un burn-out), ma patiente découvre par hasard la facture des heures supplémentaires de la prestataire : 30 heures dans le mois. Elle avoue avoir « fouiné » ce document, et ajoute aussitôt : « je n’aurais pas dû ».
En disant « j’ai fouiné… je n’aurais pas dû », la patiente désigne elle-même son geste comme un acte en trop, une transgression. Or c’est précisément là que l’inconscient parle : elle ne cherchait pas seulement une information comptable, elle cherchait à faire apparaître une vérité que l’organisation dénie.
Cet acte révèle plusieurs niveaux :
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Le retour du refoulé : La facture met noir sur blanc ce qui se jouait déjà dans ses affects — l’injustice, le non-sens de sa charge, l’absence de reconnaissance. L’inconscient l’a poussée à aller « vérifier », comme pour donner corps à son ressenti.
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Une mise en scène du symptôme : Elle se dit épuisée, en position d’enseignante de l’incompétente, sans contrepartie. L’acte vient condenser ce vécu : elle paie de sa personne, pendant que l’autre est rémunérée en heures.
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Le désir derrière l’acte : Ce qu’elle découvre, ce n’est pas seulement la facture de l’autre, mais la facture symbolique de sa propre position : donner sans retour. En fouinant, elle s’autorise un écart qui interroge directement son idéal — « Pourquoi rester dans un système où je suis la dupe ? »
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L’ouverture possible : Si elle a pu s’autoriser à transgresser (fouiner), n’est-ce pas déjà une tentative de sortir de la position de soumission ? Derrière le contrôle, il y a peut-être le germe d’un désir de rupture — réorganiser sa vie, voire changer de métier.
Conclusion :
Les formations de l’inconscient rappellent que le patient ne coïncide jamais totalement avec lui-même. Là où il croit se tromper, se distraire ou commettre un geste inutile, l’inconscient trouve à se dire. Pour le psychologue-psychanalyste, elles sont des points d’appui précieux : elles témoignent que, même là où le patient souffre d’un symptôme qui paraît fermé, quelque chose de son désir cherche encore à se formuler.